Grains égrenés, semés au vent… S’il fallait ne passer qu’un témoin parmi les quinze de cette triste semaine, ce serait celui-ci, que je vous conseille sans réserve : le court-métrage « Mangez Buvez Gavez », de David Myriam (voir son site ici, et puis Tramage d’où est issu le dessin de tête), qui montre brillamment et douloureusement quelque chose que je connaissais – la torture des oies par la pratique du gavage – à l’aide d’une technique d’animation que je ne connaissais pas – le dessin-performance sur sable & lumière.
Vais-je vous gaver avec les oies gavées ?
Vous ferai-je l’affront de rappeler l’existence de Stop Gavage, dont je parlais à l’occasion d’un Noël antérieur, dans ce petit billet ?
Ou laisserai-je opérer la magie du souffle sur le sable ?
Voilà une œuvre estimable, émouvante, énervante, dé-tranquillisante. Voilà, comme le nom l’indique, enfin, ce que devrait toujours être l’art : de l’art engagé. Aussi fort politiquement et symboliquement que réussi et inventif esthétiquement. S’il en reste pour dire que l’art ça ne sert à rien… Ben, qu’on leur donne un cœur.
Alors du coup, frétillant des ailes avec ma chère Hel, toutes deux assez émerveillées, je crois pouvoir dire, devant la beauté juste de la chose, la voilà qui souffle dans ma direction quelques petits navires, quelques autres vidéos de la même technique sableuse et lumineuse, non sur le même thème précisément, mais tout pétris du même regard trop humain, de la même pâte de verre…
Des éons que je n’avais pas été si saisie par une production graphique. Le mérite de la sélection découvreuse revient donc à ma bonne amie, qui me laissa par terre avec la performance de cette artiste ukrainienne nommée Ksenyia Simonova (son site ici). Forme et fond, tout est parfait et déchirant. Cela tient de la peinture en direct, de l’opéra, du dessin d’enfant, de la tragédie. Le public est en larmes, et j’avoue que moi de même.
Les deux suivants, pour ne pas trop vous alourdir avec une chaîne de vidéos, je les garde au creux des mains parce qu’ils m’ont le plus touchée (parmi la douzaine de vidéos suivies dans la foulée, les yeux écarquillés, un peu comme si on me montrait une dixième planète dans le système solaire), toutes deux d’Ilana Yahav : One’s man Dream 2010 ainsi que You’ve got a friend 2009. (Ne pas se fier aux titres, moins délicats que les animations correspondantes).
Je ne sais pas vous, mais moi je resterais bien là des heures, à bloquer béatement devant ces tables lumineuses éclairant par en-dessous des formes d’un instant, et à parler sans fin et sans finesse de la thérapie mondiale par la poésie pure…
Non seulement les ocres et sépias obtenus sont superbes, non seulement tout cela est réalisé, à une vitesse parfois prodigieuse, avec deux outils tout bêtes que sont les mains, mais en plus, cette façon de recouvrir le décor, d’utiliser le dessus, le dessous, de malaxer tout ça comme sur un écran invisible, de créer du réel, c’est juste… fantastique. Surréel.
J’ai vraiment eu un gros coup au coeur :)
*
Après ces grains de sable, retour explosif à la réalité multicolore, et pourtant bien glauque, de ces jours-ci, avec des graines de pastèques.
Les nouvelles toutes pourries s’étaient pourtant annoncées en fanfare, et avec un message limpide, via les pastèques qui explosent dans les champs chinois (aucun rapport bien sûr avec la pollution, les OGM, les pesticides ou le nucléaire, ou autres saloperies démultipliées). Si là on ne comprend pas qu’on a rendu la Nature folle…
C’est toujours en Chine – mais aussi en Inde me semble-t-il – que les joies de la fringue mondialisée râpent les jeans, les fleuves, les peaux, les vies, à grands coups de produits dégueulasses :
Des jeans pas très cleans – sur Basta
(J’avais un article bien plus étayé, mais je ne le trouve plus, j’ajouterai un comm’ si par un sombre bonheur je remets la main sur cette horreur éco-socio-chimico-toxique).
Et puis le monde qui part en vrille, c’est aussi un glaçon qui fond. Un glaçon de la taille d’une ville, mille glaces de la taille de mille morts, avec les belles et inquiétantes photographies de Camille Seaman dans l’océan Arctique :
Camille Seaman : photographing the disappearing Artic – sur The Ecologist
Réchauffement me dites-vous, alors voilà le dernier coup de poing à l’estomac, reçu il n’y a pas deux heures via Nathalie, pour un retour en Chine juste sidérant :
Sécheresse: le deuxième plus grand lac de Chine disparaît – sur Rue89
Pour la petite histoire, et en vous épargnant le lien pour le coup (voir La dépêche sans doute), le cradage mondial est aussi à notre porte, avec actuellement, dans ma préfecture à moi que j’ai, nommée Foix, des milliers de foyers interdits d’eau du robinet pour cause de super doses de tétrachloroéthylène, un solvant cancérigène niveau 3 utilisé dans les pressings (et je ne sais plus où), qui a contaminé l’Ariège, la rivière Ariège qui a donné son nom au département. Et hop, tout le monde à l’eau en bouteille. Et ma copine P. qui se demande si ce n’est pas en rapport avec les recherches de gaz de schiste d’il y a quelques années (dont personne ne parlait, rappelez-vous).
…Et puis alors, évidemment, et sans tournoyer dans la noirceur des actualités parfumées à la E. Coli tueuse ou aux sinistres révélations de Mr Porquet dans le dernier Canard d’hier (où je découvre, écoeurée, ne voulant pas l’accepter, que trois coeurs de réacteurs nucléaires ont bien fondu, FONDU, à Fukushima dès les premières 48h du désastre, tandis que les uns traitaient les autres de catastrophistes, et qu’un pays se prenait sa dose de radiations, à nouveau), j’achève sur la terrible, affreuse, désespérante info du barrage de Belo Monte, longtemps empêché mais plus maintenant, avec ce lien qui nous a je pense un peu tous achevés :
Les pleurs du chef indien Raoni – sur LeTitan
Et plus d’éléments là, attention, Survival ce sont des infos sur les peuples premiers qui vous décollent la peau :
L’approbation d’un méga-barrage controversé provoque l’indignation – sur Survival International
Voilà. Quatre cent mille hectares bientôt noyées, quarante mille personnes bientôt délogées et promises au néant, un massacre écologique, économique et humain… Plus la force de vous parler des ours après ça. Et gros, gros coup de blues général, face à ces absurdités à échelle géante, cette façon de foncer dans le mur à trois cent à l’heure. D’assister comme à un éloge funèbre.
*
Du grain à moudre… pour, one more time comme disait une énième poupée fake dans les années 2000, ne pas plonger définitivement dans une dépression collective tenace et mortelle, au vu de ces horreurs en série.
ça ne fait pas grand chose, certes certes (et le coup des milliers de lettres pour rien concernant le barrage de Belo Monte nous a, moi et quelques autres, foutu un sale bourdon).
Mais, encore et toujours, pour être tel le colibri apportant sa goutte d’eau sur l’incendie, comme dit Keny Arkana, la non-poupée des années de maintenant, dans une interview, pour continuer, debout, ensemble, garder la conscience en éveil et le coeur en feu.
Bon, vous savez tout ça, à force. :)
Donc, un peu vite mais très sincèrement et par la grâce des copines sur le pont :
==> Via Hélène pour la découverte de W.E. Guardians, une pétition pour arrêter la guerre à la vie sauvage, rien de moins :
End the war on Wildlife Petition – sur WildEarth Guardians
==> Via Amarige, désobéir, pas qu’un peu et en sachant pourquoi :
Le Manifeste des Désobéissants – sur Désobéir.net
(ce texte colle une patate assez incroyable, et en ce moment ce n’est pas du luxe ! J’admets que je l’ai lu avant d’avoir su pour le barrage, mais tout de même.)
==> Via une bonne âme qui me sussurait un beau jour que c’était un peu facile de recopier des liens et de faire du contenu de blog avec de la revue de presse : bon eh bien, pas de lien pour ce paragraphe, juste la certitude, tranquille, ou pas assez justement, que c’est encore la meilleure chose à faire. Passer le témoin, attraper quelques grains de sable avant la dispersion totale. Je pourrais ne parler que de ma petite vie, mes petits ou gros soucis (et il y en a, de fait), mes bouquins chéris, moi-je. Et si je ne le fais pas, ce n’est pas un oubli. C’est un choix, vraiment.
Et si cette bonne âme savait à quel point j’ai les boules à chaque fois que j’essaie de faire passer un message, quel qu’il soit, qui ne me concerne pas qu’à * moi *, et qu’on me rétorque des trucs sur ma pomme, en bien ou en mal, qu’importe (comme par ex. quand je tentais péniblement d’introduire des choses sur la situation du peuple palestinien, et qu’on me disait « ah mais quel courage », gnagna, mais fuck, c’est pas le problème, on s’en fout, et puis faut pas de courage pour dire qu’on est hallucinée par ce qu’on voit !). Si elle savait à quel point j’aimerais que le message * passe *, vraiment, vite, et beaucoup. Comme j’aimerais que les comportements changent, que les mentalités changent, qu’on puisse parvenir à ne plus se contenter de relayer les infos, s’en désoler, s’en offusquer, s’en éloigner, et qu’on se mette à * changer *, nous, chacun de nous, en commençant par soi, ses choix, sa vie, ses achats, ses…
Bon. Tout, en un mot.
Changer tout, penser Planète, et non plus Nombril.
Qu’on ne me demande plus pourquoi je fais ça, pourquoi je ne m’habitue pas, pourquoi je prends de mon si cher temps pour ce minimum vital.
Qu’on embraye.
Je ne sais pas comment dire.
Je voudrais tant que ça marche, les petites gouttes d’eau – et alors, si elle savait enfin, ce que je suis heureuse quand je vois les copines sur les barricades à leur tour, vous ne pouvez pas savoir. :)))
(ça ce n’était pas un lien de plus, c’était juste pour préciser, si besoin était, ce léger point légèrement relou, et légèrement éclairci :P)
*
Conclusion, graine de génie… Je vous laisse à l’étape avec la promesse de ce splendide texte, beau comme tout et emplissant d’évidence joyeuse (si, c’est possible après une telle litanie), un article du journaliste québecois Derek Rasmussen, intitulé « Rebâtir la communauté », écrit dans une langue simple et en uppercut direct, et paru dans le n°17 de L’Ecologiste (la même que The Ecologist, mais en V.F.).
Je n’ai pas encore déniché une éventuelle version intégrale en ligne, alors je me contente pour l’instant de la référence, si je suis motivée et/ou bien insomniaque, je vous en copierai ou scannerai de grands et merveilleux passages.
Ce qui suit, comme de juste, peut et doit être utilisé pour ce que c’est : de véritables talismans, un secret en sanskrit, et une charte pour nettoyeurs d’arcs-en-ciels. :)
Pépites…
Ils n’ont pas quitté la terre – aucun d’entre nous ne l’a fait. Nous avons tout simplement amassé des couches de béton entre elle et nous. Des couches de béton et de concepts – mais nous nous cramponnons encore plus aux concepts qu’au béton.
//
Là est le mensonge des économistes. En 1956, l’économiste DH Robertson demanda : « qu’est-ce donc que les économistes économisent ? » Sa réponse fut : « l’amour, la plus rare et la plus précieuse de toutes les ressources ».(…) Le chroniqueur du Business Week, Robert Kutitner, disait : « Cette conception de l’amour est, évidemment, l’antithèse du modèle du marché, dont l’essence est la rareté. » (…) Un père n’achète pas du pain à sa fille à partir de motivations de marché, mais à partir de l’amour. Il donne. Générosité. (Du sanskrit dana). En Orient, dana est le premier principe de moralité, un pilier de l’hindouïsme et du bouddhisme. C’est l’acte révolutionnaire le plus radical dans lequel on puisse s’engager. Donner sans rien attendre en retour? Dana n’est pas du calcul, ce n’est pas une transaction, ce n’est pas de la réciprocité. C’est le Don.
//
Alors, revenons à l’antidote : un lieu, nous devons vraiment habiter ce lieu. Nous devons au fond devenir des indigènes de ce lieu. Cela prendra des générations, une centaine d’années, deux cents ans, peut-être davantage. Or qu’est-ce qui fait qu’un peuple devient indigène ?
Les Inuits sont des indigènes ; ils connaissent leur territoire, leurs liens de parenté, leur longue histoire orale, leurs associations avec des animaux, leur climat, leurs lieux. La différence entre un indigène et un non indigène tient au type de relation avec les lieux. Les peuples indigènes pensent que la terre et le ciel les englobent, ont des droits sur eux, les possèdent. A l’inverse les peuples non indigènes croient qu’ils possèdent la terre, qu’ils possèdent l’eau, qu’ils possèdent le ciel.
Un peuple indigène se compose des gens qui croient qu’il appartiennent à un lieu ; un peuple non indigène se compose des gens qui croient que les lieux leur appartiennent.
Sommes-nous capables de prendre racine et d’habiter ce lieu-ci ?//
Nous sommes un agrégat d’individus déracinés et nous avons besoin de revenir à la maison. Mais nous ne pouvons le faire en évinçant ceux qui se trouvaient déjà là. Nous ne pouvons le faire en mettant un prix sur chaque arbre, poème, rivière ou main secourable. Nous ne pouvons le faire par peur, par cupidité ou par illusion. Nous pouvons le faire en invitant nos voisins pour le thé, en plantant un prunier tout en sachant que nos enfants auront près de dix ans quand ils pourront en cueillir les premiers fruits. Nous pouvons le faire en laissant cette terre nous appeler à la maison.
…Bon, j’achève là, je vais encore pleurer. Il y en a des pages comme ça.
Ces mots me serrent la gorge, me piquent les paupières.
Avec Derek comme marchand de sable (mais pas d’illusions), je vous souhaite une bonne nuit, les amis, en espérant vous voir rêver les yeux ouverts.
Et rentrer enfin à la maison.
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(PS. L’architecture de mes billets de Clef ressemble de plus en plus à celle du phare Psychopompe, là d’un coup c’est flagrant ^_^… En ne désespérant pas de rattraper, aussi, mon retard sur ces vagues-là, ô combien nécessaires et appréciées !)
Et déjà au réveil, une sombre prophétie sur Global Voices, où on apprend qu’un couple de défenseurs de la forêt brésilienne vient d’être assassiné. Revue de blogs sur la synthèse « Honte au Brésil » :
http://fr.globalvoicesonline.org/2011/06/02/69777/
Merci merci pour ces liens si précieux.
Me tarde de recevoir le numéro de l’écologiste pour lire ce magnifique texte.
Ca me fait penser à un autre texte… j’avais lu je ne sais plus où que l’idée de séparer l’environnement des hommes (on dit qu’on habite la planète, on sépare nature et culture) est aussi idiot que de séparer l’âme et le corps (ne dit-on pas que notre corps nous « appartient », « tu *as* de longues jambes, de grands yeux », etc ?).
Selon cet auteur donc (il me semble que c’était un homme), nous -les Humains- *sommes* la planète (elle nous porte, nous sommes faits d’elle en la buvant, la mangeant, la respirant…), nous ne la possédons pas. Et de même nous *sommes* notre corps, ce corps qui, dans cette perspective, ne fait qu’un avec l’âme.
Alors, appartenir à notre planète et « rentrer à la maison » pourrait passer par un retour de chacun à son corps (l’écouter, le respecter, etc), lieu que nous sommes ?
En écrivant, je me rends compte que ce parallèle est une évidence, et que ce retour à la Terre (!) et ce retour au Corps seraient comme l’unique face de la fameuse bande de Moëbius…
Sans transition, mais un peu quand même, je découvre l’hygiène naturelle de l’enfant, ou comment élever son enfant sans couches, c’est-à-dire comme des millions de personnes partout dans le monde (imaginez les conséquences écologiques si les Chinois utilisaient les couches jetables) qui ont heureusement échappé -pour l’instant du moins- aux recommandations sur l’apprentissage de la propreté (pas avant 18 mois disent-ils) de pédiatres corrompus par le fameux fabricant de couches jetables, que je ne nommerai pas, na !
Ca consiste à repérer les habitudes de bébé (horaires) et d’être attentif à ses petits signes qui nous disent que c’est le moment, et de lui permettre d’éliminer ailleurs que dans une couche (lavabo, bassine, bol). Davantage d’échanges donc avec bébé, plus jamais de couches ou presque, une meilleure mobilité pour bébé et une plus grande connaissance de son corps aussi (quand on y pense, pourquoi le priver de pouvoir toucher ses fesses et ses parties génitales jusqu’à 2 ans ?) un acte d’amour et de respect puisqu’il s’agit de ne plus laisser bébé dans ses urines ou ses selles…
Je pourrais écrire 200 pages sur le sujet tellement les bénéfices pour bébé, les parents et pour la planète sont évidents !!
Portage, allaitement, hygiène naturelle… poussette, biberons et couches sont voués à disparaître, -étonnant, non ?- puisque ces choix de maternage dit « proximal » (il y a aussi le cododo qui, suppose que le berceau devient inutile lui aussi) sont de plus en plus prisés en Occident.
Et un truc aussi anecdotique que pipi et caca de bébé et comment on fait avec deviennent de véritables actes d’amour et politiques.
Si vous avez l’occasion, jetez un œil au magnifique livre de Béatrice Fontanel et Claire d’Harcourt, Bébés du monde… ou comment le maternage a des aspects universels et d’autres spécifiques à chaque culture. Splendide !
Avec plaisir :)
Le numéro de l’Ecologiste est le 17 (là on attend le 35 ou le 36 je ne sais plus), c’est un ancien numéro que j’ai commandé avec d’autres, je pourrai te le passer si tu veux !
Bien vu pour le parallèle avec le corps. J’adhère intégralement :)
Et pour les couches, ou comment s’en passer, oui j’avais un peu vu un truc sur ça (mais bon, bien sûr je n’avais pas creusé beaucoup le sujet). Dans le reportage sur les bébés du monde entier (peut-être en rapport avec l’ouvrage que tu évoques), vu il y a longtemps, ils montraient des mamans en Mongolie, en Sibérie, etc, qui utilisaient des mousses sèches (des vraies mousses, quoi, des lichens) en guise d’absorption, ça le faisait bien ^_^
Et, via Anne, sur AmazonWatch, une vidéo et une pétition pour Belo Monte :
http://amazonwatch.org/take-action/stop-the-belo-monte-monster-dam?sms_ss=facebook&at_xt=4de8f5f07547e92b%2C0
Je n’y songeais plus mais grâce au commentaire de Labasoche, revoilà la pétition du chef Raoni que j’avais postée il y a quelques temps dans ce billet :
J’ai enfin mis le doigt sur ce que m’évoquait cette désolante histoire de pastèques explosives (ajoutées à tout pleins d’autres horreurs) : les mauvais présages dans les annales antiques. La sensation de catastrophe imminente, l’annonce de grands chamboulements, tout ça se disait à travers l’énumération lugubre de phénomènes perçus comme non naturels : naissance de monstres (veaux à deux têtes, bébés sans membres…), vols d’oiseaux irréguliers, phénomènes météo inexpliqués, etc. La nature devenue folle (comme tu dis), et c’était perçu comme le signe, le reflet de *la folie des hommes* (chamboulements politiques dans des sociétés ayant perdu le sens des vraies valeurs, souvent). Et voilà, on y revient : les pastèques explosives, l’eau qui prend feu (comme on disait pour Gasland), les mutations liées aux manipulations génétiques ou découlant de cata nucléaires (une grosse pensée vers les îles Marshall sacrifiées selon les Américains « pour le bien de l’humanité » – argh –, cf l’article « 7000 Hiroshima » dans le numéro 7 de XXI, article qui m’avait durablement chamboulée), etc. Tout ça tient de plus en plus, de pire en pire, du cauchemar éveillé – raison de plus de se réveiller, tant qu’on peut – et choisir la voie de l’éveil à la beauté.
… Speaking of which, mes p’tits grains de temps sont écoulés pour le moment, mais je pars en emportant, plus, en portant, cette beauté à l’alpha et l’oméga de ton billet, beauté de sable et de sagesse.
Dans l’espoir de semailles, marcheuse pollinisatrice, je fais ma part. :-)
Hey, un peu tardif (c’est le job-lag) :)
Ah, comme un parfum d’apocalypse, oui, tu as mis le doigt dessus. Je n’y avais pas songé avant, et puis en te lisant m’est brusquement venu en tête cet épisode de Buffy (où va se nicher la sémiologie mythique desfois ^_^) où l’Enfer s’ouvrait dans le ciel, et où tout partait en foirade mondiale, les monstres débarquant dans le ciel – tiens – bien réel, pour le coup. Je partage totalement cette sensation que tu décris, même si bien sûr l’utilisation d’une image monothéiste (disons) n’est pas l’objectif, forcément, disons que c’est l’image qui m’a traversée, là.
Lors, oui encore, marcher et polliniser (marcher * donc * polliniser), c’est encore la meilleure des rédemptions, ou des sauvetages, enfin je ne sais pas comment le dire. :)
Ils sont beaux ces grains de sable… Personne ne dira plus que le sable est stérile, après ça ! (Et, tiens, en parlant de pollinisation, je reçois à l’instant un bouquin sur les plantes médicinales de Mauritanie, du désert saharien quoi, et… c’est tout sauf un désert. Des dizaines de plantes, une richesse écologique insoupçonnée, et là encore, le moyen simple et disponible de développer une médecine autonome, hors labos, enfin, des voies qui s’ouvrent en suivant les grains de sable et de pollen. :)
(Et sinon, je me suis rendue compte, cette semaine, dans mon, donc, job-lag qui ne s’améliore pas du tout, que j’avais mis de côté une dizaine d’autres liens dans ma BAL pour les déposer dans ce billet, et que j’ai tout oublié ! Il risque donc d’y avoir une fournée suivante, même si une partie des liseur-ses de Clef les connaissent déjà via FB)
Hiroshima, ça travaille, hein. Ouaip. ça ne me lâche pas trop non plus, cette histoire. Il y a un manga que j’ai repéré, pas encore acquis, qui s’appelle « Gen d’Hiroshima ». J’ai bien envie d’en savoir plus…
Belle marche en plein ciel, miss, qu’Eole soulève tes ailes :)
Hey back at ya :)
Ah ça pour travailler, ça travaille… S’il existe un enfer – pour reprendre la fameuse image, qui dépasse à mon avis le monothéisme le plus borné –, c’est bien au nucléaire qu’il doit marcher…
Du coup, je suis retournée fouiner dans les archives pour retrouver ce fameux article sur les îles Marshall – je n’ai pas mes vieux numéros de XXI sous la main, les faisant tourner un peu dans toute la famille après lecture, mais il y a des traces en ligne de ce récit de réalité horrifique :
==> un article du Monde sauvegardé sur blog, avec larges extraits de « 7000 Hiroshima » : http://lebloglibredemonquartier.midiblogs.com/archive/2009/06/23/incroyable-mais-vrai-les-essais-nucleaires-sur-les-iles-mars.html
==> une interview de l’auteure, Fabienne Lips-Dumas, sur France Info, 3 minutes de pure hallu : http://www.france-info.com/chroniques-france-info-revue-xxi-2009-07-19-7000-hiroshima-les-irradies-des-iles-marshall-320768-81-387.html
S’il fallait une preuve de plus des horreurs commises par les Américains au nom de l’expérimentation nucléaire, et de l’absence totale de conscience qui les pousse encore à faire des expériences sous prétexte de soigner leurs propres victimes… Bref. L’Enfer s’ouvrant dans le ciel, wep, je me rappelle bien de cet épisode (la mort de Buffy, non ?), et le rappel est très approprié, vu les déchirures dans le tissu naturel à chaque explosion nucléaire.
Et comment ne pas songer à un paysage infernal, façon Jérôme Bosch, dans un monde qui rend possible la naissance de « bébés-méduses » ? (ou la création de vaches-hublot, dans un autre mais non moins cauchemardesque et haunting registre)
On a besoin du bel antidote que tu égrènes, oh combien. Rentrer à la maison, se percevoir non plus touristes partout mais auto-chtones, nés de la terre et l’habitant, habités par elle.
(D’ailleurs, je suis replongée, là, dans un de mes bouquins favoris, The Wood Wife par Terri Windling, L’épouse de bois, qui évoque justement ça, le lien à la terre, à travers l’histoire d’une poétesse qui s’installe dans le désert de Sonora, et apprend à en voir la beauté. Et une fois habitée par le paysage, c’est bien ainsi qu’elle appelle l’endroit, elle qui jusqu’alors se croyait d’un naturel nomade : « home ». Aaaaah :))
Il n’y a pas tant de désert, que des yeux qui n’ont pas appris à voir.
Allez, je pique une ultime citation, inspiration, au blog de Windling :
« People usually consider walking on water or in thin air a miracle. But I think the real miracle is not to walk either on water or in thin air, but to walk on earth. Every day we are engaged in a miracle which we don’t even recognize: a blue sky, white clouds, green leaves, the black, curious eyes of a child — our own two eyes. All is a miracle. » – Thich Nhat Hanh
Et c’est ce miracle-là, voir la beauté, marcher en son sein, qui pourrait bien nous sauver de l’Enfer sus-cité. :-)
La marche va se faire aujourd’hui non seulement sous le ciel, mais sous la Veggie-bannière ! De belles explorations nomades à toi, et bonne récolte dans le désert !
(je réponds avec *un mois* de retard :S ça fait donc un mois que cet onglet est ouvert !)
Viens de lire l’article. Oui, je me rappelle de la version intégrale dans XXI, mais quelle horreur, quelle horreur ce truc… Echo immédiat, au vu de l’inconscience, l’insouciance, la criminalité officielle américaine sur les populations ‘hors states’ (comme dans les films catastrophe hollywoodiens où c’est toujours sur NY ou Washington que va tomber la bombe, la soucoupe volante, le léviathan), avec Mike Davis, tu sais, dans Dead Cities, où il décrit les villes japonaises reconstituées dans le désert du Nevada (ou de l’Arizona) et bombardées méthodiquement pour voir comment ça va faire (et ça va faire, méchant), où il revient, pas comme à l’école hein (ah ça), sur la position des Alliés concernant les bombardements de civils, de villes entières pilonnées et massacrées, et en visant en priorité les quartiers miséreux pour qu’ils se rebellent contre leurs propres chefs… beuark.
Là, ce truc apocalyptique donc (oui c’est bien cet épisode-là de Buffy !), ça a en plus ce goût nauséabond, écoeurant, de la biologie qui explose, de l’ADN rendu fou, du crime ou du mal absolu… J’avais eu énormément de mal à lire cet article en entier, mais je l’avais fait, en retenant mon souffle et l’inconscient sous le talon, pour ne pas revenir à des cauchemars d’enfance pleins d’abominations (je t’avais raconté celui des chats nucléaires, et tu me parlais de tes réflexions enfantines sur comment se tirer quand la centrale explose juste à côté de la maison. Je n’avais pas dix ans mais ça reste encore et ça me dégoûte en même temps que ça me terrifie !). Bosch, ouais, complètement. Une horrible réalisation, incarnée, du monstrueux monde de Bosch…
Bon alors, côté antidotes, Terri Windling à nouveau je vois :)))
Cette citation est un baume parfait !! Si seulement nous pouvions (TOUS… ou du moins, suffisamment, parce que j’aimerais sentir le nombre de notre côté, ça vient de temps à autre sur certains sujets, mais c’est encore… peu, et fragile) ouvrir les yeux, les oreilles, les pores, la sensation, * voir, entendre et sentir * toute cette infinie Beauté dans laquelle nous baignons… Oui. :)))
Ce décalage record entre ton com’ et ma réponse, révélateur du détraquage de mes horloges & plannings, me fait me souvenir que j’ai dit que je recopierais cet article de l’Ecologiste ici même, et je ne l’ai toujours pas fait. Je pourrais peut-être le scanner, il faut que je m’y mette – comme à mille autres choses, comme d’hab. Maismaismais, au moins, pendant ce mois maudit et éreintant, j’aurais commencé à faire tourner la Roue du Changement, et je n’ai pas de réponse, mais clairement, c’est lancé, donc mon espoir est d’avoir un peu plus de temps pour la Clef et ses chers piliers Clefptomanes ;)
Un beau jour sous le soleil de Lug, miss !
Merci pour tout ça! Je lis et partage…
Les extraits du texte sur le retour aux racines, redevenir Indigène, auto-tochne… me parlent grave!! J’ai le bonheur d’avoir trouvé mon chez-moi … Mais quelque part, toute la planète est mon chez-moi, du moment que j’ai planté mes racines en un lieu. Depuis que je médite, je suis de toute façon en harmonie quasi permanente avec la respiration de la Terre. Chaque arbre qui tombe sous les bulldozers, chaque explosion pour le gaz schiste… c’est une PLAIE dans MON corps.
Je ne sais pas si cette pensée est typiquement judéo-chrétienne, mais j’espère qu’un jour ces atrocités « se payeront » et surtout s’arrêteront. J’ai pensé l’autre jour que nos petits enfants nous jugeront pour « crime contre la Vie »…
Des airs de fin du monde, de changement imminents, de grands bouleversements…. Je l’ESPERE et je « PRIE » quasiment tous les jours pour que ça arrive.
Mon cri du moment en pensant à tous ces monstres oui, humains malheureusement trop humains: « VOUS NE PASSEREZ PAS!!!!! » Je l’ai soufflé dans le creux de l’écorce des mes 2 arbres préférés, en leur disant de faire passer le mot, le cri de guerre…. Dressons-nous, oui, tous, humains arbres animaux, fiers et droits, jusqu’à ce qu’ils nous passent sur le corps ou qu’ils S’ARRÊTENT!!!!
Rien à ajouter :)))
A propos des pastèques explosives :
http://www.regards.fr/monde/des-vautours-sur-le-peloponnese
Métaphore parfaite, hélas. Enfin, bon, à y penser ce n’est même pas une métaphore, ces pastèques boostées à la folie chimique qui explosent d’elles-mêmes, c’est juste la réalité…
Brrrr.
Et alors l’écho du matin, via Hel, après les pastèques explosives, les méduses nucléaires – l’apocalypse continue, décidément :
http://www.ibtimes.com/articles/177280/20110710/jellyfish-invade-four-nuclear-reactors-japan-israel-scotland-2011-power-plant-shut-down-unusual-grow.htm
C’est dur à croire et à voir ! (et en me plantant de touche j’ai d’abord écrit « c’est dur à vroire »…)